Et ce soir-là, je ne sais,
Ma douce, à quoi tu pensais,
Toute triste,
Et voilée en ta pâleur,
Au bord de l’étang couleur
D’améthyste.
Tes yeux ne me voyaient point;
Ils étaient enfuis loin, loin
De la terre;
Et je sentais, malgré toi,
Que tu marchais près de moi,
Solitaire.
Le bois était triste aussi,
Et du feuillage obscurci,
Goutte à goutte,
La tristesse de la nuit,
Dans nos coeurs noyés d’ennui,
Tombait toute…
Dans la brume un cor sonna;
Ton âme alors frissonna,
Et, sans crise,
Ton coeur défaillit, mourant,
Comme un flacon odorant
Qui se brise.
Et, lentement, de tes yeux
De grands pleurs silencieux,
Taciturnes,
Tombèrent comme le flot
Qui tombe, éternel sanglot,
Dans les urnes.
Nous revînmes à pas lents.
Les crapauds chantaient, dolents,
Sous l’eau morte;
Et j’avais le coeur en deuil
En t’embrassant sur le seuil
De ta porte.
Depuis, je n’ai point cherché
Le secret encor caché
De ta peine…
Il est des soirs de rancoeur
Où la fontaine du coeur
Est si pleine !
Fleur sauvage entre les fleurs,
Va, garde au fond de tes pleurs
Ton mystère;
Il faut au lis de l’amour
L’eau des yeux pour vivre un jour
Sur la terre.
* * *
Canción violeta
Quién sabe en qué pensabas esta tarde,
mi dulce amor de cara entristecida,
con esta palidez que es como un velo,
al borde del estanque de amatista.
Me mirabas sin ver, porque tus ojos
se habían alejado a gran distancia;
yo te sentía andando junto a mí
y andando, sin embargo, solitaria.
El bosque era muy triste, y del follaje
cada vez más oscuro, gota a gota,
la tristeza nocturna iba cayendo
en nuestro corazón como la sombra.
En medio de la bruma se oyó un cuerno
y tú te entristeciste; sólo entonces
creyó tu corazón que iba a morir
como un frasco de aroma que se rompe.
Lentamente cayeron de tus ojos
lágrimas silenciosas de amargura,
como eternos sollozos renovados
van cayendo incesantes en las urnas.
Muy despacio volvimos. Quejumbrosas
cambian ramas bajo el agua muerta;
y yo tenía el corazón de luto
besándote en el quicio de tu puerta.
No he querido saber el escondido
secreto de esa pena que es tan honda...
Hay tardes de morriña en que la fuente
que es nuestro corazón ya nos rebosa.
Flor silvestre entre flores, es mejor
que oculten en el llanto tu misterio;
pues necesita el lirio del amor
el agua que tus ojos va vertiendo.
Albert Samain
(trad. Carlos Pujol)
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